Invisibles mais omniprésents, quelles solutions contre les micropolluants ?
Des vignobles bordelais à l’Antarctique, les micropolluants sont partout. L’équipe Physico et Toxico Chimie de l’Environnement de l’Université de Bordeaux décrypte l’origine et les solutions face à la pollution de notre environnement.
Vous avez sans doute déjà entendu parler de micropolluants. Mais savez-vous réellement ce que c’est ? Lorsque l’on évoque les micropolluants, on décrit en réalité des substances présentes dans l’environnement qui nous entoure en très faible concentration, souvent à une échelle de quelques nanogrammes ou microgrammes par litre dans l’eau ou par kilogramme dans le sol.
Etudier les micropolluants n’est pas une tâche aisée, cela revient même à chercher une aiguille dans une botte de foin. Pourtant, c’est le travail d’Hélène Budzinski et de son équipe nommée « Physico et Toxico Chimie de l’Environnement » de l’unité mixte de recherche EPOC (Environnement et Paléoenvironnement Océanique et Continentaux) de l’Université de Bordeaux. Leurs recherches sur les micropolluants organiques s’étendent à travers toute la France, notamment dans la Garonne et dans les vignobles bordelais, mais également en Espagne et même… jusqu’en Antarctique.
Quelle est la source de tant de pollution ?
L’origine des micropolluants organiques en milieux naturels dépend énormément des activités humaines adjacentes au milieu. On pourrait croire que ce sont les industries ou l’activité agricole qui polluent le plus notre environnement, et c’est en quelque sorte le cas. Mais au global, les micropolluants sont d’origine domestique, surtout à proximité des zones urbaines. Ce que l’on retrouve en particulier, ce sont les composés chimiques que l’on utilise tous les jours et que l’on rejette dans les eaux usées. Ces eaux usées, malgré et à cause de leur traitement en station d’épuration, vont rejeter des micropolluants dans la nature. En réalité, les stations d’épuration modernes n’éliminent pas entièrement les micropolluants, laissant subsister des résidus dans les eaux traitées.
Les micropolluants contenus dans nos déodorants, shampoings, savons, crèmes de beauté, détergents ou liquides vaisselles se retrouvent inexorablement dans le sol et l’eau tout autour des zones urbaines. Lorsque l’on sait qu’en 2010, en France, 21 % du territoire métropolitain est urbanisé, on peut facilement imaginer l’ampleur de la pollution sur le territoire.
Des solutions à l’échelle de chaque citoyen
Il y a plusieurs moyens d’éviter autant de pollution à notre échelle, le plus simple restant, comme le souligne Hélène Budzinski, de diminuer drastiquement notre consommation : « Moins nous consommerons, moins nous polluerons ».
Le plus gros problème est donc la surconsommation, et c’est le premier levier par lequel nous pouvons tous agir par « une démarche raisonnée et raisonnable » précise la chercheuse. Si l’on « utilise 40 crèmes le matin au lieu d’une », pour prendre l’exemple d’Hélène Budzinski, on aura un impact bien plus important sur ce que l’on rejette. Cette réflexion s’étend à tout objet de consommation, comme les vêtements par exemple, ou bien le traitement phytosanitaire que l’on applique sur son rosier pour qu’il soit le plus beau possible. En réduisant à la source les micropolluants organiques, on facilite le travail des stations d’épuration.
Vers une réutilisation de l’eau
L’une des innovations écologiques récentes les plus prometteuses est la réutilisation de l’eau, cela se fait déjà beaucoup en Espagne ou en Allemagne. Le principe est simple : l’eau sale du lavabo va par exemple alimenter la prochaine chasse d’eau. Ce qui permet une réutilisation directe de l’eau potable en eau pour des usages domestiques. On appelle cela le « Re-Use ». Puis, cette eau peut être correctement traitée en fonction du besoin ciblé, en étant redirigée après traitement vers une autre chasse d’eau par exemple. Hélène Budzinski certifie que ce système « permet de former des boucles très écologiques ».
Résoudre le problème à plus grande échelle
Une autre solution qui se fait très peu en France mais qui se fait beaucoup dans certains pays asiatiques et dans les pays scandinaves, est de traiter les eaux usées avant qu’elles arrivent à la station d’épuration. Cela se met en place avec des mini stations d’épurations collectives qui permettent de pré-traiter l’eau usée avant qu’elle ne parte dans le réseau. Ce traitement de l’eau en plusieurs étapes est beaucoup plus efficace pour dégrader les micropolluants contenus dans l’eau. « La France « accumule » du retard sur ce terrain-là », précise Hélène Budzinski.
Les solutions pour palier au problème de la pollution de l’eau sont donc déjà présentes, qu’attendons-nous pour les appliquer tous ensemble !
Timothé Gattiglio