Exoplanètes : gravitation autour de l’astrophysique
Jérémy Leconte
Jérémy Leconte est chargé de recherche CNRS au LAB (Laboratoire d’astrophysique de Bordeaux, CNRS – université de Bordeaux). Ces thématiques de recherches s’articulent autour de l’étude des exoplanètes, plus précisément de leurs atmosphères et de leurs climats dans des environnements extrêmes. Au travers de modèles numériques, son objectif est de représenter ces systèmes planétaires le plus précisément possible.
Rêves d’espaces
En cette fin de matinée ensoleillée, je rejoins Jérémy Leconte au LAB. Malgré la montée laborieuse des trois étages, l’accueil est chaleureux : une boisson chaude m’attend sur le bureau, avec comme porte thé un lamantin au regard espiègle. L’échange s’annonce sous le signe d’une discussion agréable et rythmée.
Lorsque nous parlons du parcours de Jérémy Leconte, une grande richesse s’en dégage, ainsi qu’une question : était-ce un but depuis plusieurs années de devenir chercheur en cosmologie ? On peut facilement se représenter un rêve de petit garçon, fondu d’astronomie… Cependant, ce n’était pas le cas du jeune Jérémy. Car avant tout, et ce depuis l’enfance, il était fan de… science-fiction ! Insolite pour un astrophysicien, dont les hobbys ont rejoint, quelque part, le métier.
Plus jeune, c’était un rêve de pilote qui l’animait : conquérir le ciel comme prémices de son futur. Seulement, son daltonisme sera un obstacle à cet objectif. Il imagine alors être professeur : partager ses savoirs semble l’intéresser grandement. Ainsi commence son parcours d’études, d’abord à l’École Normale Supérieure (ENS) de Lyon. Après avoir étudié la mécanique quantique, l’astrophysique se ramène à lui au travers d’un stage au Muséum d’Histoire naturelle de New York. Son planétarium lui fait découvrir les exoplanètes sous un nouveau jour, qui de fil en aiguille l’amèneront à réaliser sa thèse à Lyon : « Un nouveau regard sur la structure interne et l’évolution des planètes géantes solaires et extrasolaires ». Aujourd’hui, sa recherche autour des exoplanètes tourne autour de leurs atmosphères, comment elles réagissent à leurs environnements et à leurs étoiles. Son étude est plutôt théorique : des modèles numériques et analytiques à travers diverses observations (températures, conditions physico-chimiques, etc). Son ordinateur est devenu son compagnon de bureau !
Des renouveaux à la vitesse de la lumière
Au fur et à mesure de la discussion, nous venons à parler des différents aspects de son métier. Forcément, il y a les côtés négatifs avec des tâches administratives chronophages, cependant les avantages ne sont pas loin : travailler en équipe avant tout, mais surtout faire un métier qui évolue avec lui. Chaque année, ses thématiques de recherches changent, mais aussi ses possibilités de missions. Effectuer plus de management, de travail de laboratoire, ou même de vulgarisation, c’est autant de possibilités qui s’offrent à son poste : « Être chercheur, c’est différent tous les jours ».
Jérémy participe également à un projet d’observation du climat d’un millier d’exoplanètes, auprès de l’Agence Spatiale Européenne (ESA). Lors de ses visites là-bas, c’est l’occasion pour lui de travailler et de discuter auprès d’ingénieurs qui lui expliquent, par exemple, comment sont construits les satellites du projet. Des journées bien différentes de lorsqu’il reste devant son ordinateur à coder ses modèles de climat : comme quoi, on a jamais fini d’apprendre !
Affiche du film Star wars : l’Empire contre attaque.
Film de science-fiction préféré de Jérémy Leconte.
Aux origines d’un hobby
Les clichés ont la vie dure pour les astrophysiciens, souvent représentés comme des génies farfelus mordus d’équations… Selon Jérémy, il y a une part de vérité derrière les idées reçues, mais dans ce cas-là, cette image est très erronée. Et pour preuve : au LAB, la science n’est pas mise qu’au service de la recherche, mais aussi de l’humour. Pour exemple, il me conseille de faire un tour sur le site Arxiv.org (une plateforme de manuscrits scientifiques) au 1er avril : des fausses publications aux sujets loufoques peuvent apparaître. Car après tout, qui de mieux qu’un fan de science-fiction pour en parler ? Jérémy me parle alors d’un collègue, chargé de détecter la composition de l’atmosphère d’exoplanètes. L’idée lui est venue d’écrire un article sur comment détecter depuis la Terre une planète subissant une apocalypse zombie ! Rien de plus simple apparemment avec le méthane prétendument présent dans son atmosphère, dû à la décomposition. Pour un autre collègue qui étudie les zones habitables (zones aux conditions propices à la formation d’eau liquide sur une planète), il avait imaginé quelles conditions remplir pour observer une planète dont les océans seraient composés… de bière ! Études de pressions de CO2, conservation des bulles… Pour Jérémy, voilà un bon exemple d’une autre vision de son travail : décompresser, ne pas être trop carré, c’est aussi ça la recherche.
Écrit par Solenn Buan